L’ONG Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT) a capitalisé la célébration des 71 ans de l’adoption de la Déclaration Universelle des Droits de l’homme et des 30 ans de la Convention internationale des droits des enfants pour tirer la sonnette d’alarme en ce qui concerne les conditions de détention des mineurs en république du Congo qui ne sont pas appropriées selon l’ONG. En effet, lors d’un focus organisé à Brazzaville le lundi 9 décembre 2019 sur le thème « Trente ans après l’adoption de la Convention internationale des droits des enfants, quelles perspectives sur les détenus mineurs en république du Congo » , Christian LOUBASSOU , président de l’ACAT Congo ainsi que les panélistes ont épinglé les faiblesses du pays dans le respect des critères internationaux en matière de détention des mineurs, ainsi que plusieurs défis à relever.
Dans son discours d’ouverture de ce focus le président d’ACAT Congo a affirmé sans gants que « en raison de leur âge , les enfants sont souvent marginalisés et rencontrent des difficultés pour disposer de leurs droits ou de les faire valoir. Cela est encore plus difficile pour les enfants privés de liberté où, leur état de vulnérabilité peine à être pris en compte, leurs besoins, encore plus pressants : besoin de soins, de nourriture, d’éducation, de matériel de loisir, d’assistance juridique, de toute forme de soutien psychologique et physique . C’est ce qui fait que les conditions de détention pour les mineurs soient difficiles et ne remplissent malheureusement pas les critères internationaux dans le pays ».
La république du Congo, un pays où, a-t-on appris, il n’existe pas de structures de rééducation des enfants .Elles ont certes existé dans le passé, et ont fait leurs preuves. Le cas du centre de Louvakou ( département du Niari au sud du pays) qui n’est plus qu’un lointain souvenirs, a regretté Joseph BIVIHOU, qui développait le thème sur « La vulnérabilité des détenus mineurs à la lecture de la convention internationale des droits de l’enfant : Défis et perspectives ». L’absence de centres de rééducation pour enfants, un véritable problème en effet. Conséquence, les mineurs sont détenus dans les maisons d’arrêt pour adultes à défaut de centre de rééducation, a renchéri Joseph BIVIHOU, qui par ailleurs a fait observer le fait qu’il n’existe pas encore des textes d’application pour la loi Potignon portant protection des droits des enfants au Congo. Une loi considérée comme celle de la mise en œuvre de la Convention internationale des droits des enfants dans le pays.
Les conditions de détention des mineurs
Ce focus a eu le privilège d’avoir parmi les présentateurs, Nathalie MAKANI NKA, Présidente du Tribunal pour enfants, juge des enfants de Brazzaville. Cette dernière développait le thème lié à « La problématique de la détention des mineurs en République du Congo : Etats des lieux et perspectives ». C’est un état des lieux peu reluisant, qui s’est basée sur les exemples concrets et des chiffres qu’elle a fait. En effet, a-t-on appris d’elle, il existe dans le pays dix sept Tribunaux de grandes instances pour seulement huit maisons d’arrêt, alors que la proportionnalité devait être de mise. A la maison d’arrêt de Brazzaville, 44 des 85 enfants qui y sont en détention sont des récidivistes. Un sérieux problème reconnaissait-elle. Les remettre à la disposition de leurs parents faute de structure carcérales serait une façon d’alimenter la multiplication des crimes. Impasse. « Les conditions de détention des enfants ne sont pas à la norme », a –t- elle dit, et de proposer que soient créées des prisons pour mineurs.
Par ailleurs, la Présidente du Tribunal pour enfants a évoqué un cas qui a fait froid dans le dos à plus d’un. En effet, dans la prison de Gamboma (une ville du département des Plateaux au nord du pays) , deux mineurs ont été détenus pendants deux mois sans se laver ni aucune moindre mesure d’hygiène de vie. Une durée qui, on le sait, est en dépassement de celle de la garde à vue, si elle doit s’appliquer chez les mineurs car, a rappelé Joseph BIVIHOU, la garde à vue pour le cas des enfants n’est pas appliquée qu’à ceux de moins de 15 ans.
Les défis à relever
Ils sont nombreux. Quelques uns ont été rappelés. Il s’agit de entre autres de la suppression de la distance temporaire entre les textes juridiques et leur efficacité sur le terrain ; la construction de centres rééducatifs et d’apprentissage de métiers ; la construction des maisons d’arrêt avec des quartiers des mineurs répondants aux normes standards internationaux ; la formation et le recrutement des directeurs de la protection judiciaires de l’enfance, des psychologues, des éducateurs, des assistants sociaux.
En rappel, Convention internationale des droits des enfants fut adoptée le 20 novembre 1986 après dix ans de négociations. Elle a un caractère contraignant. 196 Etats sur les 197 membres de l’ONU y ont adhéré dont le Congo. Il est cependant à noter que le pays doit relever des défis en termes d’ amélioration de la réactivité en déposant dans les meilleurs délais les rapports de la mise œuvre de cette Convention, ou encore entre autres et à la prise des textes d’application de la Loi Potignon qui s’aligne sur ladite Convention. Photo : Le Président de l’ACAT Congo (deuxième à partir de la gauche) encadré par les panélistes ( Crédit Groupe Congo Médias)